La Lettre

Novembre 2024


L'édito de Fabrice de Cholet

Fabrice de Cholet
Directeur Général

« Herbivores » contre « Carnivores »

Les relations transatlantiques entre les États-Unis et l’Europe, après la Seconde Guerre mondiale, sont marquées par une coopération intense mais aussi par des tensions et critiques récurrentes. Emmanuel Macron distingue ces approches par les métaphores "herbivores" et "carnivores" : les "herbivores" favorisent des alliances équilibrées et variées, tandis que les "carnivores" adoptent des stratégies dominatrices et exclusives, cherchant souvent à renforcer leur influence sans souci de coopération. Dans ce contexte, l’Amérique est souvent perçue en Europe comme un acteur "carnivore" en raison de sa quête de domination dans divers domaines.

Domination économique et influence politique

Le Plan Marshall a permis la reconstruction rapide de l’Europe, mais il a aussi initié une forme de dépendance économique vis-à-vis des États-Unis. Par la suite, l’imposition du dollar comme monnaie de référence à Bretton Woods a renforcé la suprématie américaine dans le système financier mondial, perçue par les Européens comme une forme de domination. Les géants de la technologie, tels que Google et Facebook, accentuent cette emprise en matière de souveraineté numérique et de protection des données.

Dépendance militaire et désaccords stratégiques

Après 1945, la création de l’OTAN a placé les États-Unis en tête de la sécurité militaire européenne. Cependant, cette dépendance a suscité des critiques, notamment à propos du rôle des États-Unis dans les décisions stratégiques, réduisant l'autonomie européenne. Les Européens ont aussi reproché aux Américains leur approche "carnivore" en matière de politique étrangère, notamment avec des interventions militaires unilatérales, comme en Irak en 2003, et une méfiance envers les institutions internationales, préférant l’unilatéralisme au multilatéralisme, prisé par l’Europe.

Divergences environnementales et tensions commerciales

Le retrait de l’accord de Paris par l’administration Trump a illustré les clivages profonds entre les deux partenaires. Les européens, engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique, ont vu cette décision comme une rupture de responsabilité globale. En outre, les tensions commerciales ont marqué leurs relations, notamment par des désaccords sur les normes et les subventions, renforçant les inquiétudes européennes quant à leur souveraineté économique.

Influence culturelle et technologique

Depuis le XXe siècle, l’Amérique a transformé la culture européenne, exportant ses modèles de consommation de masse, sa musique, et son cinéma, souvent perçus comme des vecteurs du "rêve américain". Des leaders européens comme Angela Merkel ont exprimé leur mécontentement après les révélations d’Edward Snowden concernant la surveillance de la NSA, soulignant une atteinte à la vie privée et une méfiance persistante.

Un partenariat toujours essentiel

Bien que cette relation soit ponctuée de critiques et d’inquiétudes quant à la domination américaine, le partenariat transatlantique reste crucial. Il est un pilier de stabilité mondiale et d’idéaux démocratiques partagés, comme le souligne Macron en appelant l’Europe à une position "herbivore" pour équilibrer les intérêts et réduire la dépendance face aux "carnivores".



Cette page a été publiée le 02/12/2024