La Lettre

Avril 2025


L'édito de Fabrice de Cholet

Fabrice de Cholet
Directeur Général

La France sous la menace des agences de notation

L’année 2025 s’ouvre dans un climat économique assombri. La croissance ralentit, les perspectives s’érodent et la pression sur les finances publiques se fait plus forte. L’agence de notation Standard and Poor’s (S&P) a maintenu la note de la dette française à AA-, mais a abaissé sa perspective de « stable » à « négative », adressant un signal d’alarme sur la trajectoire budgétaire du pays.

Croissance à la peine

La prévision de croissance, initialement fixée à 0,9 %, a été abaissée par la Banque de France à 0,7 %, en raison notamment de la guerre commerciale déclenchée par les États-Unis. L’Insee confirme un début d’année atone, rendant improbable une reprise dynamique. Le 10 avril, le comité d’alerte sur les finances publiques pourrait marquer un tournant, avec une révision officielle des prévisions.

Comptes publics sous tension

Le ralentissement économique entraîne une baisse des recettes fiscales et sociales, tandis que les dépenses augmentent, notamment celles liées au chômage. Selon les experts, une baisse de 0,2 point de croissance accroît le déficit de 0,1 point de PIB, soit 3 milliards d’euros. Pour maintenir un déficit limité à 5,4 % du PIB, Bercy devra probablement annuler jusqu’à 10 milliards d’euros de crédits, comme en 2024. L'inflation, bien que modérée, pèse sur les recettes de TVA, compliquant encore les équilibres budgétaires.

L’alerte de S&P

S&P motive son changement de perspective par l’augmentation de la dette publique et l’incapacité politique à corriger les déficits structurels. La réforme des retraites de 2023, si elle venait à être affaiblie, représenterait un facteur de risque supplémentaire. L’agence avertit : en cas de croissance durablement faible ou de dérapage budgétaire, une dégradation de la note est à prévoir. Le ministère de l’Économie a tenté de rassurer, soulignant que la France conserve une « signature de très haute qualité », tout en reconnaissant l’ampleur des défis.

Arbitrages politiques et fragilité budgétaire

Depuis la chute du gouvernement Barnier, l’équipe menée par François Bayrou a réussi à faire adopter son budget. Toutefois, les ambitions de redressement ont été revues à la baisse : le déficit visé passe de 5 % à 5,4 %, et la croissance de 1,1 % à 0,9 %. S&P, pour sa part, anticipe 0,8 %. Après Fitch, qui avait déjà placé la France sous perspective négative en octobre, Moody’s pourrait suivre lors de sa revue du 11 avril, après avoir abaissé sa note à Aa3 en décembre. Malgré ces vents contraires, la France conserve des atouts solides et une capacité éprouvée à rebondir.

"La prospérité est le fruit du courage dans l'incertitude."
Joseph Schumpeter


Cette page a été publiée le 07/04/2025