Après les surenchères, la désescalade.

Qu’attendre maintenant des marchés financiers ?

La volatilité des marchés financiers s’est nettement accrue au cours du mois d’avril, à la suite des annonces de hausse des droits de douane faites par le président Donald Trump le 2 avril et des surenchères qui s’en sont suivies jusqu’au 9 avril. Plusieurs soutiens de Donald Trump, issus notamment du secteur économique et du monde des affaires, ont alors publiquement exprimé leur désapprobation. Ils ont dénoncé des droits de douane excessifs, susceptibles d’avoir un impact négatif considérable sur le pouvoir d’achat des ménages américains ainsi que sur la compétitivité des entreprises nationales. Par ailleurs, la flambée des taux américains et les fortes baisses des marchés actions ont également fini par jouer comme force de rappel. Face à ces tensions, Donald Trump a finalement annoncé, le 9 avril, la suspension pour 90 jours des droits de douane excédant le taux plancher de 10%. Toutefois, cette mesure de suspension exclut la Chine, qui reste soumise à un taux majoré de 145%. Ces annonces ont permis aux marchés de fortement rebondir sur la deuxième partie du mois d’avril. L’incertitude demeure tout de même élevée, notamment en ce qui concerne l’issue des négociations avec différents pays à l’échéance de cette période de 90 jours. Le risque de récession s’est éloigné, sans pour autant disparaître. Par ailleurs, le contexte actuel continue de peser sur la confiance des ménages et sur la consommation alors que le risque inflationniste demeure orienté à la hausse. Comme nous l’écrivions le mois dernier, le pessimisme était devenu excessif. Les tendances baissières que les indices avaient commencé à dessiner nous semblent invalidées à court terme par la vigueur du rebond intervenu et par ses motivations. Il nous semble cependant un peu prématuré d’espérer le rétablissement immédiat d’une tendance haussière des indices actions mais celle-ci nous semble toujours d’actualité à moyen terme. Aux cours actuels, les actions nous semblent moins attractives à court terme. La volatilité des dernières semaines a permis de réaliser des achats dans de meilleures conditions. Il nous semble judicieux d’attendre de nouveaux replis moins prononcés (entre 3% et 5%) pour continuer à augmenter le poids des actions dans les portefeuilles. Nous avons laissé nos prévisions inchangées sur tous les indices pour juin et décembre 2025. Compte tenu de leurs niveaux actuels, le potentiel de hausse des indices est nul à fin juin. Il est réduit à environ 5% à fin décembre. Nous préférons maintenir encore quelques temps une opinion Neutre sur les actions à court et moyen terme. Sur les produits de taux, nous gardons une note Neutre à court et moyen terme. Cependant, les obligations privées européennes et les emprunts d’Etat de la zone euro commencent à retrouver un certain attrait.

Les performances des indices boursiers mondiaux exprimées en euros ont été négatives au mois d’avril. Une nouvelle fois, les bourses américaines ont accusé le coup (-5.5% en euros) et les marchés européens ont mieux résisté (-1.4% en moyenne). Les marchés émergents ont été très mitigés sur le mois (-4.0%). Ces constats de fin de mois masquent de fortes baisses proches de 15% entre le 2 avril et le 9 avril. Depuis leurs sommets postérieurs à l’élection de Donald Trump jusqu’au plus bas récent, l’amplitude de la correction des grands indices a été proche de 20% et même -26% pour les valeurs du Nasdaq. Les marchés obligataires ont été également très agités. Aux Etats-Unis, les taux longs ont évolué entre 3.8% et 4.6% et en Allemagne, entre 2.75% et 2.4%. Parallèlement, le dollar subissait une mini crise de confiance en se dépréciant face à de nombreuses devises. 
Les craintes et les incertitudes qui ont pesé sur les marchés financiers se sont amplifiées jusqu’au 9 avril avant qu’un apaisement n’intervienne.

En effet, rappelons que les droits de douane annoncés lors du «Liberation Day» le 2 avril s’étaient révélés bien plus sévères que prévu, entrainant de vives réprobations générales et des risques de surenchères ravivant les craintes d’une récession, non seulement aux États-Unis mais également à l’échelle mondiale. Contrairement aux espoirs de Donald Trump, la résistance initiale des pays visés a été forte en particulier en Chine. La surenchère a porté les droits chinois à 125% et les droits américains à 145% ! 
La soutenabilité limitée de cette politique protectionniste a conduit certains soutiens ou proches alliés de Donald Trump à émettre des réserves, voire des critiques, à l’égard de sa stratégie commerciale. Par ailleurs, la flambée des taux américains et les fortes baisses des marchés actions ont également fini par jouer comme force de rappel. Face à ces tensions, Trump a finalement annoncé, le 9 avril, la suspension pour 90 jours des droits de douane dits «réciproques». Toutefois, il convient de souligner que le tarif plancher de 10% applicable à l’ensemble des pays reste en vigueur. En outre, la Chine, toujours ciblée par un taux exceptionnellement élevé de 145%, ne bénéficie pas de ce moratoire. En conséquence, le taux effectif moyen pratiqué par les Etats-Unis demeure largement supérieur à celui qui préexistait (2,3%).

Cette reculade a été bénéfique à plus d’un titre. En premier lieu, elle a montré que Donald Trump n’était pas inflexible, contrairement aux commentaires les plus négatifs. En deuxième lieu, d’autres exemptions ont été accordées sur certains produits essentiels pour les Etats-Unis (comme lors du premier mandat) ce qui prouve que Donald Trump sait se montrer pragmatique en cas de nécessité. Enfin, cette décision permet d’espérer l’ouverture d’une phase de discussions avec plusieurs partenaires commerciaux, susceptible d’aboutir à des droits de douane bien plus modérés que ceux initialement dévoilés, et plus proches des niveaux anticipés avant les annonces du 2 avril. 

Le rebond des marchés depuis les points bas du 9 avril a été puissant et a permis aux indices de revenir sur les niveaux d’avant le «Liberation Day». Cette reprise a été alimentée par l'espoir d'une désescalade des tensions commerciales et d'une stabilisation des perspectives économiques et plus globalement d’une réduction du risque. Le changement d’attitude de Donald Trump devrait écarter selon nous l’éventualité d’un retour des indices sur les points bas. Cependant, de nombreuses incertitudes persistent car la politique commerciale de l'administration Trump demeure incertaine et les négociations seront ardues. De plus, la confiance des pays partenaires commerciaux et des investisseurs envers les États-Unis a été ébranlée. Les perspectives d’investissement des entreprises et leurs prévisions de bénéfices sont revues à la baisse, reflétant les inquiétudes quant à la croissance économique future.
Certaines données économiques récentes confirment ces préoccupations, comme la chute de l’indice de confiance des consommateurs du Conference Board de 7,9 points en avril pour s'établir à 86, son niveau le plus bas depuis mai 2020. Cette baisse reflète une détérioration des anticipations des ménages concernant la situation économique future. Les transporteurs aériens et maritimes signalent également une forte baisse des flux avec les Etats-Unis.
Le recul du produit intérieur brut (PIB) des États-Unis de 0,3% en rythme annualisé au premier trimestre 2025, marquant la première contraction depuis 2022, est moins préoccupant car il est dû essentiellement aux très fortes importations réalisées par anticipation avant la hausse des droits de douane. Les autres composantes du PIB (consommation et investissement) sont restées satisfaisantes.
D’autres évolutions favorables peuvent être signalées, comme l'inflation qui continue de ralentir, avec un taux annuel de 2,4% en mars, contre 2,8% en février, atteignant ainsi son niveau le plus bas depuis septembre 2024. Le marché du travail qui reste robuste, avec une création de 177 000 emplois non agricoles en avril et un taux de chômage stable à 4,2%. De plus, les prix du pétrole ont significativement baissé, ce qui aura pour conséquence de limiter l’impact inflationniste de la hausse des droits de douane et d’améliorer le pouvoir d’achat des ménages. Par ailleurs, la perspective de baisse d'impôts annoncée par l'administration Trump, bien que conditionnée à son financement, ainsi que la poursuite de la déréglementation économique, pourraient soutenir l'activité. Sur le plan international, un éventuel cessez-le-feu en Ukraine peut constituer un facteur de soutien supplémentaire par le recul de l’incertitude géopolitique qu’il engendrerait.

Pour toutes ces raisons, la probabilité de récession américaine, montée jusqu’à plus de 50%, a commencé à refluer. Il est cependant indéniable que la croissance de nombreux pays restera amputée de 0.5% à 1%, selon les prévisions récentes. A ce petit jeu, les Etats-Unis et la Chine seraient les plus touchés et l’Europe relativement épargnée.

D’ailleurs, les marchés européens résistent toujours relativement bien, continuant de bénéficier de l’impact positif du plan de relance budgétaire allemand et du plan d’investissement massif de 800 milliards d’euros dans l’armement de l’UE. Enfin, la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) continue d’apporter un soutien supplémentaire aux marchés. Poursuivant son cycle de baisse des taux, la BCE cherche à atténuer les effets du ralentissement économique et à restaurer la confiance des investisseurs. Cette politique accommodante contraste avec celle de la Réserve fédérale américaine, qui reste sous pression face à un marché du travail qui reste robuste et des risques inflationnistes que la politique commerciale des Etats-Unis rend encore difficiles à estimer.

En résumé, le fort rebond des indices nous semble justifié en dépit des incertitudes qui subsistent. En revanche, celles-ci peuvent entraver la poursuite de la hausse à court terme et même occasionner de nouveaux replis moins sévères en cas de nouvelles échauffourées que Donald Trump peut encore nous réserver. 

Comme nous l’écrivions le mois dernier, le pessimisme était devenu excessif. Donald Trump a fini par revenir en partie au pragmatisme de son premier mandat comme nous l’estimions. Les tendances baissières que les indices avaient commencé à dessiner nous semblent invalidées à court terme par la vigueur du rebond intervenu et par ses motivations. Il nous semble cependant un peu prématuré d’espérer le rétablissement immédiat d’une tendance haussière des indices actions mais celle-ci nous semble toujours d’actualité à moyen terme.

Aux cours actuels, les actions nous semblent moins attractives à court terme. La volatilité des dernières semaines a permis de réaliser des achats dans de meilleures conditions. Il nous semble judicieux d’attendre de nouveaux replis certes moins prononcés (entre 3% et 5%) pour continuer à augmenter le poids des actions dans les portefeuilles.

Nous avons laissé nos prévisions inchangées sur tous les indices pour juin et décembre 2025. Compte tenu de leurs niveaux actuels, le potentiel de hausse des indices est nul à fin juin. Il est réduit à environ 5% à fin décembre. 

Nous préférons maintenir encore quelques temps une opinion Neutre sur les actions à court et moyen terme. 
Sur les produits de taux, nous gardons une note Neutre à court et moyen terme. Cependant, les obligations privées européennes et les emprunts d’Etat de la zone euro commencent à retrouvent un certain attrait.

Lors de notre dernier comité d’allocation d’actifs fin avril, nous avons relevé légèrement le poids des actions en conservant une position neutre. Nous avons augmenté la pondération des produits de taux, principalement les fonds de multi-stratégie obligataires, en réduisant à nouveau les liquidités.

Sommaire :

Editorial
Economie : les incertitudes liées à la guerre commerciale n’ont pas totalement disparu.
- Etats-Unis : le rythme de l’activité s’est stabilisé en avril et l’inflation a sensiblement baissé.
- Zone Euro : l’expansion de l’activité a ralenti en avril et l’inflation de base s’est redressée.
- Japon : retour marqué de l’activité en expansion et stabilité de l’inflation.
- Pays émergents : légère accélération de l’expansion en Inde, modération en Chine, retour du Brésil en contraction.
Marchés de taux d’intérêt : divergence de politiques monétaires et baisse des taux longs.
Marchés des changes et des Matières Premières : baisse du dollar et du pétrole, hausse de l’or.
Résultats des entreprises : prévisions 2025 et 2026 abaissées plus sensiblement.
Evolutions des secteurs européens : sous-performance des grandes capitalisations.
Evolutions des indices sectoriels américains : les technologiques reprennent des couleurs.
Evolution des marchés actions : atténuation de la contreperformance des actions américaines.
Valorisation des marchés actions : nouvelle réduction de l’écart entre Etats-Unis et Europe.
Stratégie d’investissement : opinion Neutre maintenue sur les actions à court et moyen terme.
Allocation d’actifs d’un fonds patrimonial Equilibré : légère hausse du poids des actions.

Vincent GUENZI
Directeur de la Stratégie d’Investissement
Achevé de rédiger le 7 mai 2025 en collaboration avec Dorian FOULON


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Cette page a été publiée le 07/05/2025